La Liberté, Marie-Alix Pleines, 20 octobre 2004
Le nouveau cycle composé par Caroline Charrière sur des poèmes de Lorca émeut par une adéquation étonnante entre paroles et musique. Créées dimanche dans la grande salle des Halles à Bulle, les Ferias ont réservé un instant de grâce au nombreux public de l’avant-dernier concert des Fêtes musicales.
Intense et concentrée, la comédienne Céline Cesa déclame en français une excellente traduction des vers de Lorca. Procédant par touches minimalistes, trois musiciens brossent des esquisses sonores sobres et suggestives. La voix immédiate de la soprano argentine Maria Cristina Kiehr se prête souplement à chaque contour expressif. Trépidant, insouciant, rêveur ou fantasque, le commentaire mélodique de la flûte traversière, interprété par un Nicolas Murith mercurien et sensible, s’associe à la moindre inflexion vocale, joyeuse, contemplative ou désespérée. Souverain, Matthias Spaeter, à la guitare, propose un axe rythmique à ce langage tonal, dynamisé de tensions subites.
Intervalles inattendus, écarts de tessiture, variations extrêmes de la pulsation agitent des chevaux de bois fantômatiques, à bout d’une épuisante course lunaire. Une valse lente fait danser la voie lactée. Quelques notes hagardes, fredonnées bouche fermée, soufflées à la flûte, égrenées à la guitare, et la fête foraine s’évanouit comme un mirage. Pour le plus grand plaisir d’un public subjugué.