Caroline Charrière
Caroline Charrière

La Gruyère et La Liberté, avril 2005

›Qohélet

La Gruyère, Patrice Borcard, 12 avril 2005

Pour célébrer son centenaire, le Conservatoire de Fribourg ne pouvait échapper à un concert commémoratif. Mais au lieu d’une commémoration, l’institution a préféré une création, doublée d’une aventure pédagogique et humaine. L’oratorio composé par Caroline Charrière, qui enseigne dans l’établissement, a été interprété par un orchestre et un choeur formés de professeurs, d’élèves et d’anciens élèves.

Sûr, Caroline Charrière ne fait pas dans la banalité. Et cette oeuvre Qohélet, ce magnifique livre de l’Ancien Testament, est une musique exigeante, dense et lumineuse à la fois.

Avec Qohélet, Caroline Charrière confirme ce qu’elle avait déjà démontré dans le Livre de Job : une vraie personnalité musicale. La compositrice possède un style qui évolue au gré des textes et des circonstances. Un style où rien n’est gratuit, où tout est pensé, senti, entendu. Un climat porté par une richesse d’inventions sonores, soutenu par une profondeur de l’inspiration.

Avec Dieu, Caroline Charrière libère les énergies mystiques contenues dans le texte, offrant un relief au doute qui traverse l’Ecclésiaste.
… Comme cette ouverture où les vents aspirés vers les hauteurs de l’échelle sonore tirent des fils entre ciel et terre. Comme ce superbe moment où voix et instruments dessinent le nom de Dieu sur une toile immobile.

Voix et instruments sont entraînés par la compositrice, qui dirigeait son oeuvre, au coeur de cette Présence. Avec une simplicité expressive qui permet à toute l’intériorité contemplative et mystique de ces pages de s’épanouir.

La Liberté, Marie-Alix Pleines, avril 2005

Une méditation à la fois fastueuse et puissante, portée par des effets orchestraux d’une remarquable adéquation avec les images bibliques.

Car la musicienne maîtrise ses classiques. On pense à la rigueur néoclassique d’un Chostakovitch ou d’un Prokoviev. Et cette mise en valeur impressionniste du texte, psalmodique ou percussif, ou encore cette présence chorale complètement immergée dans le tissu symphonique, ne rappellent-elles pas Ravel, Debussy ou Honegger ?

C’est en tout cas l’extraordinaire talent d’orchestratrice de la compositrice fribourgeoise qui se révèle dans une véritable cohérence expressive.

Sans doute Caroline Charrière exprime-t-elle ici une vision métaphysique qui la touche intimement. Avec un art consommé des subtilités symphoniques et des possibilités techniques de chaque instrument. Cette vision confère à des sonorités contemporaines, et parfois surprenantes, l’évidence d’un langage universel et étonnamment accessible.

Et si tout est "hével", l’onde musicale qui parcourait l’aula de l’Université de Fribourg samedi avait l’exaltante saveur du talent.

retour